LE PÈRE NOËL EST GAY ET LES ENFANTS DE CHOEUR SURDOUÉS
Le mardi 23 et le mercredi 24 janvier 2007, nous avons pu échapper encore une soirée devant la télé grâce au Festival C’est de la Danse Contemporaine (CDC), qui présentait David Flahaut avec son «Presque Ève» au Studio du Centre de Développement Chorégraphique (CDC) de Toulouse, et Les Ballets C. de la B. (Contemporains de la Belgique, pour les néophytes) avec «VSPRS» de Alain Platel et Fabrizio Cassol, au Théâtre National de Toulouse (TNT).
«Presque Ève» habite ce territoire d’incertitude et d’insuffisance, où un corps d’homme investit les stéréotypes d’identité de notre société de consommation.
Du Père Noël aguicheur, qui pèle façon «Cage aux Folles» des patates, jetant les débris de façon provocatrice et affecté, à la «Presque Ève» qui éclot de derrière un mur de magazines «3 Suisses», croqueuse de pommes de terre, pécheresse malgré soi et qui s’adonne à une gestuelle effrénée, qui nous parle nonchalamment de désir.
Cette «Presque Ève» blonde platine de récupération, habillée en petite robe rouge uni face (qu’elle tourne au gré de ses déambulations), n’a pas de tabous (comme toute Ève, en opposition à tout Adam, simplet de nature, qui serait toujours au Paradis sans rien connaître au Monde), et dans son corps désirant et désireux, elle s’engouffre et nous engouffre dans la vision macho-chrétienne de nos propres valeurs d’héritage. Et on comprend peut-être pourquoi il est si difficile à la femme de se libérer de ce poids de pécheresse originale.
Puisque malgré son investissement dans ce corps de désir, corps de plaisir, rapport Soumise-Maîtresse, David Flahaut nous donne un portrait d’un presque épanouissement du corps, dans sa sensualité et sexualité, mais qui sous le poids d’un regard socioculturel avec des siècles de tradition, reste mal compris, triste et seul, tel l'enfant qui n’arrive pas à faire comprendre aux adultes «civilisés» le nouveau jeu qu’il vient d’inventer.
«Presque Ève» a tout de même la faiblesse du «presque», de rester dans l’insuffisance, de passer d’idée en idée un peu trop vite (peut-être est cela un objectif ?), et aussi d’une conceptualité parfois trop intérieure, qui éloigne cette «Presque Ève» de la sensibilité du public.
Et si «Presque Ève» commence par croquer des pommes de terre, «VSPRS» commence par caresser du pain, pour le croquer aussi en suite, dans une sorte de rituel («eucharistique» ? ou de rédemption ?).
Alain Platel réunit encore une fois une équipe d’exception qui donne un spectacle digne des «Vêpres» de Monteverdi (dont la musique de Fabrizio Cassol s’inspire) ou de Rachmaninov.
Une dizaine de danseurs-interprètes, une soprano et 9 musiciens donnent corps, voix et son à cette création des Ballets C. de la B.
Et sur la grande scène du TNT tout se mélange : la soprano Maribeth Diggle s’essaye drôlement au mouvement, pendant que Rosalba Torres Guerrero est époustouflante dans ses apports théâtraux, dans sa chanson «christique» et dans la sobriété de sa danse.
Au niveau mouvement nous nous sommes habitués à ce que Les Ballets C. de la B. nous montrent des danseurs d’une virtuosité inouïe, et «VSPRS» ne fait pas exception : ces jeunes gens évoluent dans un tremblement présent dès le début de la pièce jusqu’à l’extase explosif et mortel de la fin.
Ce tremblement du corps et des esprits, «leitmotiv» de «VSPRS» est exploité dans bien de ses possibilités : du «je ne sais pas ce qui m’arrive», au frénésie, à la béatitude, à la masturbation, à l’attaque cardiaque…
Dans un décor blanc et douillet, mai non sans danger (espèce de structure d’escalade de Peter De Blieck), «VSPRS» nous offre des successions d’images : de la danseuse avalée par son pantalon et qui s'y contorsionne à souhait, engagé en suite dans un duo circassien et que plus tard essaye de se faire remarquer en faisant des pointes, au danseur qui esquisse des pas classiques tout en se déshabillant, qui plus tard montre une maîtrise théâtrale-vocale dans des phrases désarticulées robotiquement, à une danse des mains, ou à la danseuse hyperlaxe qui laisse son corps partir nonchalamment dans tous les sens en espérant qu’on l’a rattrape… il y en a pour tous les goûts !
Même malgré sa longueur (1 heure 40) et ses moments «15 minutes de gloire» où chaque danseur s’adonne trop à une virtuosité devenue gratuite et vide de sens, parce qu’excessive, «VSPRS» reste un grand moment de spectacle vivant «made in» Belgique.
Il nous reste la question : que serait-il arrivé si quelqu’un du public avait accepté l’invitation pour monter sur scène, tant de fois répétées par les interprètes ?
http://www.cieguttapercha.fr
http://www.lesballetscdela.be
http://www.cdctoulouse.com
Libellés : Critique, Français, Spectacles
1 Comments:
Pour avoir vu VSPRS a Avignon l'ete dernier, j'ai ete particulierement decu par ce Platel la !
Certes, les danseurs restent d'exception et pour moi, ce sont eux qui sauvent le spectacle.
Mais apres ? Ou est le sens ? Que veut nous dire Platel ? Personnellemnt je n'ai rien compris, ni rien ressenti, aucune emotion.
Partant du principe qu'un spectacle doit soit me faire reflechir (m'apporter des idees, vehiculer un message...) ou me donner une/des emotion(s), et que rien de tout cela ne m'a ete offert par ce spectacle, j'ai fortement deconseille a mon entourage d'aller voir VSPRS.
Il manque beaucoup d'humanite dans ce spectacle particulieremnet froid.
By Anonyme, at 1/26/2007 11:02 AM
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